Les cours du pétrole ont-ils touché un point bas ?

Les cours du brut léger américain (WTI) viennent d’inscrire un plus bas depuis quatre ans à 55 $ le baril. Comme pour l’ensemble des matières premières, les fluctuations de prix dépendent de l’équilibre entre la demande et l’offre. Si la demande baisse et que l’offre augmente, alors le prix du pétrole baisse et vice versa.

Les prix baissent depuis 18 mois, mais cette baisse pourrait s’enrayer et un rebond durable pourrait avoir lieu.

Faiblesse de la demande mondiale et augmentation de l’offre via l’OPEP+

Les principaux facteurs de la glissade des prix du pétrole, sont les inquiétudes concernant une récession mondiale déclenchée par la guerre commerciale, qui entraînerait un ralentissement significatif de la demande de pétrole. A l’annonce des droits de douane réciproques le 2 avril dernier, les cours du pétrole sont passés de 72 $ (le 2 avril) à 55 $ (le 9 avril). Les investisseurs se sont inquiétés de la Chine en particulier où la consommation de pétrole pourrait être encore plus faible en raison des tarifs exceptionnellement élevés. La reprise économique chinoise reste poussive. La demande de pétrole, notamment dans l’industrie et les transports, n’a pas retrouvé les niveaux espérés.

Les prix du pétrole ont chuté à leur niveau le plus bas depuis août 2021, une période où l’économie mondiale se relevait de la pandémie de Covid-19. Alors que les prix avaient connu une tendance baissière ces derniers mois, l’OPEP+ avait tenté de les stabiliser en réduisant sa production. Cependant, l’organisation a créé la surprise en annonçant, le 3 mai dernier, une augmentation de sa production de 411 000 barils par jour, soit trois fois plus que les 137 000 barils supplémentaires initialement prévus. En incluant les augmentations de production d’avril et de mai, près d’un million de barils supplémentaires par jour seront réintroduits sur le marché !

Il y a quand même un bémol, car l’objectif premier de l’Arabie saoudite, n’est pas d’entrer dans une guerre des prix, mais de contraindre certains des membres de l’OPEP à respecter leurs quotas de production. L’objectif serait de normaliser une situation existante et de réduire l’incidence de l’augmentation de production sur les marchés internationaux. En effet, l’excédent de production non conforme des membres, équivaut approximativement aux augmentations de production décidées par l’OPEP+ entre avril et juin, soit environ un million de barils par jour !

Ces niveaux de prix sont difficilement tenable pour la production américaine

L’impact de ce recul des prix commence à se faire sentir au Texas et au-delà : les sociétés de schiste réduisent leurs dépenses et annoncent une réduction du nombre de plateformes de forage et d’équipes de fracturation hydraulique qu’elles emploient. Les États-Unis représentent deux barils de pétrole sur dix pompés dans le monde ; ce qui se passe là-bas a donc un impact considérable.

Le pic de production du pétrole de schiste américain est probablement atteint aux prix actuels. Contrairement aux baisses rapides de 2015 et 2020, une trajectoire de plateau ondulant est plus probable et sera déterminante pour le marché mondial.

Pour le pétrole de schiste, de faibles variations de prix impactent fortement la production : sous 50 $ (catastrophe) et au-dessus de 70 $ (forte croissance). Actuellement, les signaux de ralentissement sont visibles : le nombre de plateformes de forage est au plus bas depuis fin 2021, mais surtout, le nombre d’équipes de fracturation dans le Permien a chuté à 105 (contre 160 en 2023 à 100 $ le baril), un niveau inédit en quatre ans.

La production totale de pétrole aux États-Unis a atteint son dernier pic en octobre, à 20,68 millions de barils par jour, selon les données gouvernementales. Les données hebdomadaires les plus récentes, généralement moins fiables, situent la production totale à environ 20,4 millions de barils par jour. Pour l’instant, tout porte à croire qu’un pic de production a été atteint et que même une légère baisse pourrait se matérialiser, ce qui permettrait aux prix du pétrole de ne pas aller plus bas.

Les facteurs qui pourraient faire remonter les cours

Compte tenu des perturbations potentielles de l’approvisionnement, dues aux sanctions et aux droits de douane, à la fois pour les acheteurs et les vendeurs, il est peu probable que les prix du pétrole restent longtemps inférieurs à 60 dollars. La récente baisse des prix pourrait même être de courte durée, amortie par la demande estivale anticipée et les risques géopolitiques persistants.

Ces risques se sont encore accrus ces derniers jours. Un accord de paix entre la Russie et l’Ukraine est loin d’être trouvé. Par ailleurs, l’administration américaine semble déterminée à frapper l’économie vénézuélienne et à dissuader certains pays d’acheter son pétrole. Et, surtout, la menace de nouvelles sanctions américaines contre l’Iran n’a jamais semblé aussi forte.

Washington a fait pression, ces derniers jours, sur des institutions financières pour qu’elles cessent de soutenir les exportations de pétrole de l’Iran. Des actions militaires contre les infrastructures ne sont pas, non plus, à exclure. Autant de mesures qui pourraient réduire fortement les exportations iraniennes, qui s’élèvent aujourd’hui à 1,6 million de barils par jour, presque exclusivement vers la Chine. Un manque que l’OPEP est largement capable de compenser.

Toutes ces conjonctions de facteurs font que les prix du pétrole auront du mal à descendre durablement sous les 55 $ le baril. Les cours ont d’ailleurs récemment entamé un rebond, les cours repassant au-dessus des 60 $. (voir ma vidéo). Un retour vers 72 $, niveau préannonce des tarifs douaniers, n’est pas à exclure.

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Antoine Fraysse-Soulier est responsable de l’analyse des Marchés chez eToro. Ayant plus de quinze ans d’expérience en finance de marché (Brokers, Asset Managers), il nous a rejoint en 2019 pour partager sa connaissance et son expérience à toute la communauté eToro.

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